Le 15 novembre 2013, dans l'arrêt Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 401 (2013 CSC 62), la Cour suprême du Canada (CSC) a déclaré la Personal Information Protection Act (PIPA) de l'Alberta et son règlement d'application invalide.
Avant de présenter l'analyse de la CSC, rappelons que l'intervention de la CSC s'inscrit dans le cadre d'un litige ayant "pris naissance lorsque le syndicat Travailleurs et travailleuse unis de l'alimentation et du commerce, section locale 401 a enregistré des vidéos et pris des photos de personnes en train de franchir sa ligne de piquetage, en vue de s'en servir par la suite dans le cadre de son conflit de travail" [par. 2] et ayant donné lieu au dépôt de plaintes auprès de l'Office of the Information and Privacy Commissioner (OIPC) de l'Alberta invoquant que "les activités du syndicat contrevenaient à la PIPA, qui restreint la faculté d'un certains nombres d'organismes de recueillir, d'utiliser et des communiquer des renseignements personnels" [par. 2].
L'arbitre mandaté par l'OIPC a donné gain de cause aux plaignants [par. 6]. Le syndicat a dès lors "formulé une demande de contrôle judiciaire dans laquelle il a allégué que la loi en question portait atteinte à la liberté d'expression que lui garantit l'al. 2b) de la Charte canadienne des droits et libertés et que cette atteinte n'est pas justifiée au sens de l'article premier [de la Charte]" [par. 2].
La juge en son cabinet, et par la suite la Cour d'appel, ont conclu au fait que "les activités du syndicat comportaient un contenu expressif et qu'il n'y avait aucune raison de les soustraire à la protection de l'alinéa 2b) [et que] la PIPA restreignait directement la liberté d'expression du syndicat en lui interdisant de recueillir, d'utiliser et de communiquer des renseignements personnels concernant des personnes alors qu'elles étaient à la vue du public. [Dès lors] cette violation ne pouvait se justifier au sens de l'article premier" [par. 7 et 8].
Et, la Cour d'appel a considéré "que la PIPA avait une portée trop large. En effet, d'une part, le droit au respect de la vie privée en jeu était mineur, puisque les plaignants se trouvaient dans un lieu public, qu'ils franchissaient une ligne de piquetage et qu'ils étaient avisés que des images étaient recueillies. D'autre part, il fallait tenir compte du droit des travailleurs de négocier collectivement et de celui du syndicat de communiquer avec le public" [par. 8].
Partant, pour déterminer si la PIPA est ou non constitutionnelle, la CSC a dû répondre aux deux questions suivantes: